Organisation : Annaig Oiry et Etienne Toureille

Contact: annaig.oiry@gmail.com ; etienne.toureille@cnrs.fr

Date prévue: avril-mai 2021 (à préciser)

Lieu: à définir

Liste des invités: à venir

Présentation :

La dernière année fera figure de page sombre dans l’histoire universitaire, avec une disparition soudaine de ce qui était pour beaucoup jusqu’alors le principal espace de travail, la salle de cours, pour un nouvel espace virtuel désigné dans le vocabulaire prolifique de la crise sanitaire et du confinement par le néologisme de “distanciel” (imitation du terme “présentiel” pour désigner les activités à distance). Et que dire des enseignements “hors les murs” si important dans notre discipline notamment?

Mais la facilité de l’analogie entre l’espace “réel” et l’espace virtuel de l’internet, largement critiquée par les spécialistes de la géographie du numérique 1 s’arrête probablement au stade de la métaphore. La plupart des collègues qui n’étaient jusqu’à maintenant pas familier des cours en ligne se sont retrouvés face à un mode de travail inédit qui les a poussé à profondément transformer leurs pratiques de travail. Les enseignants se sont confrontés à un dispositif socio-technique particulier. L’adaptation s’est faite dans l’urgence et a souvent été difficilement vécue par les enseignants. Elle les a conduits à bien des bricolages. Certains se sont inventés comme experts locaux de ces nouvelles pratiques. Cette adaptation n’a au fond jamais été réellement questionnée, critiquée. A-t-elle été pertinente ? Aurait-il fallu refuser de faire cours derrière son ordinateur ? 

L’atelier-débat se focalisera sur les transformations liées à ce type de pratiques du numérique sur les enseignements en géographie et sciences de l’espace. Mais aussi sur les conséquences présentes comme à plus long terme de ce type de transformation en interrogeant les conséquences sur les inégalités entre formation, universités et enseignants par rapport aux nouvelles injonctions. Ce sera également l’occasion de réfléchir aux risques d’irréversibilité d’une telle transformation avec le risque de voir certaines formations ou institutions profiter de la situation comme une opportunité inattendue de dématérialiser et parfois monétariser davantage des formations.

Ces nombreux bricolages et adaptations ont en conduit beaucoup à penser ces transformations comme des innovations. Mais s’agit-il réellement d’innovation dans la mesure où tout un champ professionnel consacré à la formation à distance pré-existait ? Les confinements successifs  ont-t-il de nouveau permis de mettre en valeur l’absence de formation chronique et de discussion collective consacrée à l’enseignement dans le supérieur? Quels problèmes idéologiques ce choc technique et technologique a-t-il révélé : pensée magique liée à l’outil technique et à l’organisation générale du travail (illusion de l’ubiquisme abolissant la “distance” pourtant mise en exergue dans le terme de “distanciel”, d’horaires et parfois les limites entre sphères professionnelle publique et sphère privée, familiale, récréative, etc.) ou au contraire rejet en bloc d’une nouvelle forme d’injonction paradoxale dans un champ déjà passablement échaudé dans un contexte de lutte et de résistance face au démantèlement de l’Université et de défiance des acteurs politiques au pouvoir vis-à-vis des SHS.

Esprit du débat:

  • Partir des expériences et des pratiques: Dans la logique des Feuilles de Géographie, il sera donc question de proposer une discussion partant de la pratique et de l’expérience d’enseignants impliqués dans ces nouvelles formes d’enseignement. 
  • Un débat nécessairement à plusieurs voies: Comme dans les précédents ateliers-débats, il nous semble important qu’une diversité de profils d’enseignants tant par les contenus de leurs cours (enseigner le terrain dans ce contexte) que leur affiliation institutionnelle ou statutaire, leurs conditions de vies matérielles et familiales, participe à cette discussion, tant ces paramètres ont pu jour comme facteur d’inégalité. En tant qu’espace de discussion sur les pratiques d’enseignement à l’Université, les Feuilles de Géographie pensent qu’elles se situent dans un espace d’expression qui se doit d’essayer de dresser un inventaire à chaud de ces pratiques.
  • “Venez comme vous êtes”: Enfin, l’objectif de ce débat n’est pas de trouver une solution univoque ou de renforcer une vision binaire ou manichéenne du débat qui emprunterait à l’opposition entre technophiles et technophobes, largement mise en exergue dans la sphère publique (les enseignants en SHS sont-ils des Amish?) Pour cela nous souhaitons laisser la place à une pluralité d’expérience entre des praticiens experts de l’usage des outils numériques ou des formations à distance et ceux pour qui ces différents éléments ont été nouveaux. La parole sera donné à des enseignants critiques envers ces nouveaux modes de fonctionnement.

Déroulement envisagé:

Nous proposons d’organiser cette discussion en plusieurs temps:       

  • Un retour d’expérience: Un premier temps de discussion sera consacré à une discussion collective qui prendra  du recul sur les expérience d’enseignement à distance. Ce sera le moment de prendre le temps de parcourir les différentes transformations identifiées: expérience sur les contenus (cas des cours sur le terrain, cours en atelier, commentaire de carte, cartographie numérique, travaux en groupe, formation des futurs enseignants dans ce contexte), sur les compétences techniques des enseignants, sur les pratiques d’évaluation des étudiants, sur la relation enseignant-étudiants et entre étudiants. Ce moment sera propice à faire le bilan sur le vécu de ces transformations.       

  • Irréversibilités et prise de consciences des maux de l’ESR? Dans un deuxième temps la discussion s’orientera davantage sur les transformations induites sur l’organisation du travail universitaire: quelles conséquences sur la répartition des tâches, la mise en commun des problèmes et des solutions, sur les rapports de dominations de l’ensemble des acteurs impliqués? D’un autre côté, est-ce que cette transformation aux conséquences parfois désastreuses sur les formations et les conditions de la vie étudiante n’a pas conduit à une prise de conscience générale de problèmes structurels dans l’ESR, que cette situation inédite n’aurait en quelque sorte que servi d’amplifier et de mettre en lumière? Comment dès lors partir de ces transformations pour aboutir à politiser davantage les questions d’enseignement ?   

  •   Is resistance futile? Enfin, le dernier temps posera la question de savoir si l’adaptation était/est souhaitable et/ou légitime? Y-a-il moyen de transformer positivement ces bouleversements ou de limiter leurs impact négatifs? Est-il souhaitable de revenir en arrière, de faire comme si les “cours Zoom” ‘avaient jamais existé ? Quelles sont les capacités des résistances ou les stratégies qu’il est possible de mettre en œuvre à la fois au niveau individuel et politique? Comment le collectif peut-il contribuer à cela? 

Comment y assister, y participer ?

Les ateliers-débats des Feuilles de Géographie sont ouverts à tou·tes. Nous espérons pouvoir organiser cet atelier en “présentiel”: le lieu de l’atelier sera communiqué prochainement. Néanmoins, pour anticiper l’organisation, et notamment la préparation du traditionnel apéritif-dinatoire succédant à l’atelier, merci de nous annoncer votre présence en contactant les organisateurs·ices.

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  1. Beaude, B. (2008), Eléments pour une géographie du lieu réticulaire. Avoir lieu aujourd’hui. Thèse de doctorat, Université Paris 1 Panthéon-Sorbone, 391 p.
  2. Crédits photo: By Bernard Marti – Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=55924105

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